Investissement public local : la reprise des dépenses en 2017 ne cache pas que du bon. Explications.

Par Tiphaine Huige

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Scoop. Pour la première fois depuis une dizaine d’années, le déficit public de la France est repassé, en 2017, sous la barre des 3 % exigés par les traités européens.

Selon les premiers résultats de l’étude récente publiée par l’INSEE, les administrations publiques locales (Apul) ont conservé leur capacité de financement mais ont vu leur excédent reculer de 3 milliards d’euros en 2016 à 0,8 milliard d’euros en 2017. Ce qui n’est pas rien. Mais cette dégradation de plus de 2 milliards d’euros serait principalement due à la hausse de l’investissement de 2,9 milliards d’euros après trois années consécutives de baisse. De prime abord, c’est finalement une assez bonne nouvelle pour la santé financière des collectivités.

Selon une note d’analyse de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) du 27 mars 2018, a été constatée une reprise « assez nette » de 6,5 % des dépenses d’équipements directs en 2017 pour les collectivités locales. En effet, après une baisse – disons historique – des dépenses d’équipements directs entre 2013 et 2016 (liée notamment à la baisse des dotations étatiques mais qui a été compensée par la hausse des impôts), le constat effectué en 2017 était attendu (avec une année de retard sur les prévisions).

Or, selon l’OFGL, le niveau d’investissement actuel demeure faible en comparaison à la moyenne des investissements sur les 20 dernières années.

En euros constants, l’OFGL constate alors un « niveau actuel inférieur de 8 % », soit « près de 3 milliards d’euros d’équipements directs en moins ». En prenant en compte également la population et son évolution, cet écart s’accentue puisque, « à population comparable, le niveau d’investissement actuel est inférieur de 13 % ».

Pour expliquer ce phénomène, peuvent être mises en avant deux éventualités, à savoir :

  • le fait que les niveaux d’équipement étaient particulièrement forts au milieu des années 2000 et que les besoins ne sont plus aujourd’hui aussi importants ;
  • il peut aussi, et surtout, relever des inquiétudes sur la situation du patrimoine public.

Concernant les investissements indirects, l’OFGL a relevé que les subventions d’équipement versées entre niveaux de collectivités, entre 2013 et 2017, auraient diminué de 25 % ; le principal échelon « perdant » étant le bloc communal.

En réalité, l’Observatoire met en exergue l’interaction de deux phénomènes, à savoir, d’une part, une baisse des demandes de subvention émanant du bloc communal liée à la baisse des dépenses d’équipement et, d’autre part, une volonté de plus grande maîtrise des dépenses des principaux financeurs, que sont les départements et les régions.

Globalement, cette reprise faible de l’investissement local, comme l’indique l’OFGL, s’accompagne également d’une dégradation globale de solvabilité des collectivités locales. Ainsi, l’INSEE qualifie la situation financière actuelle des collectivités de « dégradée ».

Le niveau d’investissement – bien qu’en hausse sur une courte période – n’est donc pas un révélateur suffisant de la santé financière des collectivités. Il est nécessaire de prendre en compte le niveau d’endettement (qui a progressé au niveau local), l’épargne brute, les caractéristiques socio-économiques, démographiques, etc. qui jouent également un rôle prépondérant.

À noter enfin que les élus locaux pourraient être pris à leur propre jeu, consistant à mettre tous les maux des collectivités sur la baisse des dotations de l’État. En effet, pour le gouvernement, cette reprise de l’investissement serait gage de l’actuelle bonne santé financière des collectivités. Ainsi, l’effort demandé aux collectivités dans le cadre de la contractualisation serait, de ce point de vue, soutenable. Gare aux apparences.

Sources :