Préconisations du CFL sur la refonte de la fiscalité des collectivités : incidences en cascade de la suppression de la taxe d’habitation

Par François Fourmeaux

Publié le

Réformer la fiscalité locale est un exercice délicat qui s'apparente quelque peu à un jeu de mikado : peut-on toucher à une taxe sans toucher aux autres ? Pas si simple, à en croire les préconisations formulées par le Comité des finances locales dans sa délibération du 27 février dernier. Adoptée à l'unanimité des votants – à l'exception notable des représentants des départements, qui se sont abstenus – cette délibération formule un certain nombre de propositions en vue de compenser la suppression de la taxe d'habitation.

Alors que la mission « Richard-Bur », mandatée par le Premier Ministre, a remis une note sur la refonte de la fiscalité locale dans le contexte de suppression de la taxe d’habitation, le Comité des finances locales (CFL) a également souhaité faire entendre sa voix sur le sujet.

L’enjeu est de taille : récupérer à l’euro près un manque à gagner pour les communes et leurs groupements évalué à pas moins de 26 milliards d’euros à l’horizon 2020.

Pour ce faire, le CFL, qui regrette que la refonte de la fiscalité « affaiblisse, en particulier, l’autonomie fiscale et la libre administration des collectivités concernées », ne souhaite pas la suppression de la taxe d’habitation soit financée, même partiellement, par une dotation de l’État. Au nom du principe d’autonomie fiscale, le Comité appelle de ses vœux que tout impôt supprimé soit remplacé par une autre ressource fiscale, ce qui le conduit à proposer un mécanisme de compensation décomposé en plusieurs volets.

Tout d’abord, il préconise que soient transférées au bloc communal :

  • premièrement, la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), soit une compensation qui serait estimée à environ 16 milliards d’euros ;
  • deuxièmement, « une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) évoluant chaque année selon la dynamique de l’assiette nationale ». Une solution originale, mais qui n’est pas inédite dans son principe : depuis le 1er janvier 2018, les régions perçoivent elles aussi une fraction de la TVA, en lieu et place de la dotation globale de fonctionnement (loi de finances pour 2017, art. 149).

Ensuite, et pour compenser le manque à gagner qui en résulte pour les départements, le CFL propose de leur attribuer « une fraction de la contribution sociale généralisée » (CSG) et de leur accorder la faculté d’adopter un taux additionnel de CSG.

Restera ensuite à l’État de trouver le moyen de compenser l’absence de perception d’une partie de la TVA et de la CSG.

Ces préconisions sont plus généralement l’occasion pour le CFL de rappeler son attachement au principe de libre administration des collectivités, et de tenter d’y apporter des garanties supplémentaires. À cet égard, il propose par exemple de circonscrire la notion de ressources propres des collectivités territoriales, définies à l’article L.O. 1114-2 du CGCT, aux seules ressources pour lesquelles les collectivités ou les EPCI « disposent d’un pouvoir de taux ou d’assiette ».

Cette délibération intervient en tous cas dans un contexte de plus en plus marqué par une cristallisation des tensions autour du principe de libre administration des collectivités territoriales. Outre le rapport de la mission Richard-Bur, la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale vient de mandater une « mission flash » sur l’autonomie financière des collectivités territoriales. Celle-ci dressera « un état des lieux du cadre constitutionnel régissant les finances locales et formulera des propositions visant à mieux garantir constitutionnellement la capacité des collectivités à financer leurs actions ». Enfin, les deux décisions rendues par le Conseil d’État le 21 février dernier, relatives aux compensations des transferts de charges, ne devraient pas manquer de susciter quelques réactions.

Affaire à suivre.

Sources :