Versement de transport : chacun chez soi

Par Julien Chemoul

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L'article L. 2333-69 du CGCT dispose que le versement de transport est perçu pour le compte des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) par les « organismes ou services chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale et des allocations familiales suivant les règles de recouvrement, de contentieux et les pénalités applicables aux divers régimes de sécurité sociale ». Par un arrêt en date du 15 juin 2017 n° 16-12510, la Cour de Cassation vient de préciser les rapports existant entre l'URSSAF, chargé de procéder au calcul et du recouvrement du versement transport, et l'AOM.

En l'espèce, la DCNS avait obtenu de l'URSSAF un crédit correspondant à un trop perçu du versement de transport qu'elle avait réglé au titre des exercices 2005 à 2008. Ce crédit devait s'imputer sur les sommes dues au titre des trois exercices suivants. Cet échéancier étant devenu caduc, la DCNS aurait procédé d'office à un auto-dégrèvement du versement transport en compensation de la créance qu'elle possédait sur la communauté urbaine de Brest Métropole Océane.

Cette dernière a donc assigné l'URSAFF afin de faire annuler la décision de dégrèvement accordée à la DCNS. La cour d'appel a rejeté la demande de la communauté urbaine, au motif qu'elle ne démontrait pas un intérêt à agir. Elle a considéré que le fait que, d'une part, l'AOM ne démontait pas le bien fondé de sa demande et l'existence du droit qu'elle invoquait, d'autre part qu'en l'absence de contentieux avec la DCNS, il n'existait pas d'intérêt légitime à agir.

La Cour de Cassation rejette le pourvoi mais procède néanmoins à une substitution de motif. Elle estime que la requête de la communauté n'était pas recevable au motif « qu'il résulte de l'article L. 2333-69 du Code général des collectivités territoriales que les organismes de recouvrement qu'il mentionne sont seuls compétents pour procéder aux opérations d'assiette et de recouvrement du versement de transport, et que les autorités organisatrices de transport sont étrangères à celles-ci ».

Ainsi, il semble que le bénéficiaire du versement de transport, tiers à son calcul et à son recouvrement ne puisse pas faire annuler une décision de dégrèvement accordée par les URSAFF. Cette position paraît particulièrement inique pour les gestionnaires locaux. En effet, il est difficilement concevable que les AOM soient liés, sans possibilité de contestation, par les décisions prises par les URSAFF, les contentieux pouvant porter sur des sommes non négligeables. En l'espèce, l'indu était de prêt de 7 200 000 €, pour l'ensemble des établissements de l'entreprise.

Toutefois, il convient de rappeler que les bénéficiaires du versement de transport bénéficie de l'article L. 2333-74 du CGCT qui dispose que « la commune ou l'établissement public est habilité à effectuer tout contrôle nécessaire à l'application des articles L. 2333-69 ».

Ainsi, les collectivités peuvent avoir un droit de regard sur le travail effectué par les URSAFF en matière de perception du versement de transport. Il n'en demeure pas moins que la position de la Cour de Cassation pose une jurisprudence dont les effets sont potentiellement fortement préjudiciables aux AOM.

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