Élargissement de l’assiette d’IFER : un surcroît de ressources fiscales pour les collectivités à mesurer

Par Tiphaine Huige

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L’imposition forfaitaire sur les réseaux (IFER), impôt créé par la loi de finances pour 2010, constitue avec la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) l’une des ressources de substitution de la taxe professionnelle.

Perçue au profit de l’État en 2010 et des collectivités à partir de 2011, elle taxe les grandes entreprises des réseaux d’énergie, de télécommunications et de transport. À titre informatif, en 2015, le produit de l’IFER s’est élevé à 1,47 milliards d’euros, ce qui représente environ 1,85 % du total des impositions des collectivités.

La loi de finances rectificative pour 2017, dans son article 49, élargit l’assiette de l’IFER aux réseaux de communication en fibre optique ou en câble coaxial.

L’élargissement de l’assiette sera, cependant, en vigueur à compter du 1er janvier 2019. En effet, avant cette date, l’IFER ne porte que sur les seuls répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre.

Selon les parlementaires, les collectivités gagneraient 25 millions d’euros dès la première année de la mise en œuvre de l’élargissement de l’assiette de l’IFER. Toutefois, le gain réel de cette mesure pose question. Bien évidemment, l’emploi du conditionnel est de rigueur.

Sur ce point, plusieurs aspects peuvent être mis en exergue :                      

  • le gain portera en réalité sur les réseaux en câble coaxial, qui existent déjà et qui comptent des abonnés depuis longtemps. Les lignes ouvertes seront donc immédiatement taxées. À court terme, la contribution à cet « IFER étendu » pèsera sur les propriétaires de réseaux câblés. En effet, concernant la fibre optique, les abonnés qui en bénéficieront dans le futur sont actuellement reliés par la boucle locale cuivre qui est déjà imposée à l’IFER. Ainsi, sur la fibre, il n’y aura pas de surcroît de recettes fiscales pour les collectivités en 2019. Le gain est donc à nuancer ;
  • le III bis de l’article 1599 quater B du Code général des impôts prévoit une exonération de 5 ans pour les lignes raccordées. Cette exonération retardera, dans les faits, le gain fiscal attendu par l’élargissement de l’assiette de l’IFER. Toutefois, ce mécanisme est prévu afin de ne pas trop pénaliser les réseaux nouvellement déployés (ou ceux à venir) dans les zones les moins denses ou ayant un équilibre financier incertain ;
  • l’élargissement de l’IFER pose la question de la remise en question de l’économie des contrats, notamment de délégation de service public (très haut débit par exemple), entre collectivités délégantes et opérateurs délégataires visant à confier à ces derniers la réalisation et l’exploitation des réseaux en fibre optique.

En réalité, il est probable que les opérateurs (délégataires des contrats) se tournent vers l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) afin que cette fiscalité supplémentaire soit prise en compte dans les tarifs fixés par les lignes directrices. Ainsi, le surcoût pèserait plus sur les opérateurs commerciaux qui fournissent l’abonnement au client final, les collectivités ne devant pas être impactées par cette hausse de la fiscalité. Il est également envisageable que le client final supporte en partie (avec les opérateurs commerciaux) ou en totalité cette fiscalité supplémentaire.

À ce jour, il est seulement possible d’émettre des hypothèses quant aux répercussions pratiques de l’élargissement de l’assiette de l’IFER. 2019 nous donnera des premières certitudes. En attendant, l’heure est à l’imagination.

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